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Photo du rédacteurRameurs Tricolores

Parole de rameuse : Séoul, ma joie et ma déception

Dernière mise à jour : 9 juin 2019


Jeux Olympiques de Séoul 1988 - 4XSW

Enfin ! J’y suis ! Après deux sélections olympiques refusées (Moscou en 80 et Los Angeles en 84), le 4 de couple, dont j’ai assuré la sélection durant ces deux dernières olympiades, est présent à Séoul et moi avec ! 

Je reçois cette nouvelle avec un immense bonheur. Je sais que c’est la fin de ma carrière alors je ne veux surtout pas rater ce dernier rendez-vous international. Et quoi de plus beau que de finir en participant aux Jeux Olympiques, Jeux dont j’ai tant rêvé et pour lesquels je me suis tant entraînée.


2 ans auparavant, lors des Championnats du Monde à Nottingham, l’équipage Lafon, Gossé, Julien, Coupat assure la sélection de la coque pour Séoul en terminant 5ème de la finale. En cette année olympique, ce même équipage brille lors des différentes régates internationales. Ces résultats nous laissent beaucoup d’espoir pour accéder à la finale Olympique.

Stage terminal à Bellecin dans le Jura. Des sorties pas toujours très bonnes, des tensions qui commencent à monter entre nous…. Et à la fin du stage, après les parcours handicaps, les entraîneurs annoncent les équipages sélectionnés et à notre grande surprise, la non sélection du 4 de couple masculin. Départ pour Séoul 15 jours avant la date officielle des Jeux. A l’aéroport nous retrouvons les cavaliers de l’Equipe de France d’Equitation (avec leurs chevaux qui voyagent dans la soute avec les lads), et l’Equipe de France de Voile. Je ressens une grande fierté : enfin je pars, mon rêve se réalise ! 

Très long voyage et l’arrivée à Séoul. Les journalistes attendent les athlètes et nous répondons à quelques interviews en anglais. Nous montons dans le bus qui nous emmène sur notre lieu d’entraînement qui est à environ 1 heure de route de Séoul. Le stage se déroule sur un petit lac situé aux abords d’un charmant village dans lequel se trouve l’hôtel que nous occupons. Les nuits sont difficiles avec le décalage horaire et le matin, de bonne heure, nous sommes réveillés par les marches en chanson des militaires américains qui ont leur base à proximité de l’hôtel. 


Les entraînements

En arrivant sur le bassin d’entraînement, j’étais loin de m’imaginer que j’allais vivre un cauchemar. De pire en pire ! On ne savait plus ramer ! Il a fallu reprendre les fondamentaux, comme des débutantes.... Moments de doutes, de questionnements. C’est le DTN, Bernard Leroy qui s’y colle ! Finalement, à l’issue de ces deux semaines d‘entraînement, le bateau commence à avoir un peu plus d’allure mais il y a encore quelques problèmes techniques non résolus (qui n’étaient pas présents lors du stage terminal en France). Le souci est   que, pendant que l’on travaillait pour retrouver notre coup d’aviron et la cohésion, le programme physique n’a pas été réalisé. Un gros manque qui allait nous coûter cher. 

Départ pour Séoul. Quelle émotion en arrivant devant l’entrée du village ! J’en ai les larmes aux yeux. J’avais attendu tellement longtemps pour défendre mes chances dans un évènement de cette ampleur, après avoir subit les décisions injustifiées de nos dirigeants et entraîneurs ! Ce jour est enfin arrivé ! J’y suis !


Après avoir passé la sécurité, nous sommes accueillis avec une petite cérémonie par les officiels et les bénévoles du village. Nous prenons possession de nos appartements et puis nous nous conformons aux exigences réglementaires à savoir, pour nous les filles, faire le test de féminité ! Nous partons à la reconnaissance du village et surtout du lieu de restauration. Des cuisiniers français étaient présents pour assurer nos habitudes alimentaires. Mais les équipes étrangères avaient vite repéré le restaurant français et s’y rendaient en nombre. Bien souvent, il ne restait plus nos plats préférés dans les présentoirs. !              

Le village accueillait toutes les délégations et toutes les disciplines sportives, excepté la voile qui était en bord de mer.

Excellente organisation des transports pour se rendre sur chacun des sites de compétition qui étaient pratiquement tous dans la ville de Séoul.



Cérémonie d’ouverture


Nous n’avons pas eu le droit d’y participer. Les éliminatoires débutaient le lendemain pour nous. Énorme déception ! C’étaient mes premiers et derniers Jeux ! Nous avons regardé la cérémonie à la télévision dans notre appartement. J’aurai tellement aimé y participer. 


Les courses


Le bassin de compétition est à environ 40 minutes du village. Nos sorties en bateau sont irrégulières en qualité : les problèmes techniques et le manque de motivation sont toujours présents. De plus, une forte tension (qui s’était installée petit à petit depuis le stage terminal), ne permet pas la cohésion de l’équipe. 


Éliminatoires.


Bon départ et dans le 1er 500m nous sommes bien positionnée. Et puis rapidement le bateau perd de la vitesse, ça se dégrade techniquement et je ne sens pas de volonté de repartir. On subit la course. Résultat : dernières. Quelle déception ! J’espère que l’on va se reprendre, que ce résultat va nous faire réagir.

Repêchages : nous avons le meilleur repêchage que l’on peut espérer. Durant l’année, nous avions battu facilement toutes les équipes présentes dans cette course, excepté la Roumanie. Cette course est pour nous ! Et bien non ! Même scénario que pour les éliminatoires ! 

Au bout de 500 m, le bateau s’arrête, plus personne !!!! De ma position au 4, je relance de la voix, je pousse plus fort et plus vite sur les jambes, en accélérant encore plus vite l’arrière. Je crie encore, mais pas de réaction….le bateau ne décolle pas. Et je vois les belges, que nous avions battues de 10 secondes à Lucerne, qui nous passent et qui gagnent leur place en finale. Immense déception. Je me sens tellement frustrée de ne pouvoir accomplir ce pour quoi je me suis tant entraînée et qui était à notre portée ! Larmes….


De retour au parc à bateau j’ai honte ! on prend enfin le temps de parler, de crever l’abcès. Mais c’est trop tard. « on aurait dû mettre la remplaçante dès le départ » ! Je ne sais plus quoi penser. Je suis tellement déçue ! Etre venue là pour faire ça ! 

A ce moment de la compétition, il n’est plus possible de changer qui que ce soit dans le bateau à moins d’une maladie ou d’une blessure. Maintenant il faut absolument terminer en gagnant la petite finale. Pour nous, les courses se suivent et se ressemblent. C’est en finissant dernières de ces Jeux que nous quittons la compétition et c’est sur cette note bien amère que je termine ma carrière…. Quelle tristesse. 

La semaine suivante, et c’est ça la magie des Jeux, j’ai pris plaisir à aller soutenir différentes équipes de France et assister aux compétitions dans plusieurs disciplines : volley ball, Basket, tennis, athlétisme, escrime et j’ai eu la joie d’assister au couronnement de l’équipe de France d’escrime par équipe à l’épée. 


Beau souvenir également de la cérémonie de clôture dans le stade où les sportifs de tous pays se rassemblent pour fêter la fin des Jeux et le transfert de la flamme Olympique à la Ville de Barcelone. C’était un grand moment d’émotion. 


Je garde en moi ce sentiment d’inachevé mais aussi d’une carrière bien remplie avec certes des peines mais surtout beaucoup de joie, de partage, d’émotion lors des victoires qui ne sont vécus que dans le sport et qui restent inoubliables.


Monique Coupat

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